Dans les deux articles précédents, nous avons parlé de l’actualité mouvementé du Valais du 14ème siècle. Le Comte Vert, souverain de la Savoie, était aux prises avec le pouvoir valaisan, d’un côté le Prince-évêque de Sion et, de l’autre, les patriotes (citoyens de premier rang se rebellant contre le tout puissant siège épiscopal).
Après la terrible bataille de 1354, laquelle eut lieu devant les murs de Sion et vit les troupes valaisannes écrasées, malgré leur bravoure, par la puissante armée de Savoie, les sédunois, déprimés, pansaient leurs plaies. Ils n’osèrent pas se rebeller à nouveau contre la maison de Savoie avant la mort du Comte Vert, trente ans plus tard. Cependant, leur colère contre l’évêque, Guichard Tavelli, ne diminuait pas. Le prélat les avait trahi avant la bataille en demandant la protection du Comte de Savoie face aux patriotes, toujours plus déterminés à lui ôter le pouvoir temporel. Pour les Valaisans, il s’agissait d’un acte impardonnable.
Quelques années après la bataille, Amédée accepta de rendre une large part de leur indépendance aux communes valaisannes, contre une somme d’argent importante. L’évêque Guichard récupéra ainsi un pouvoir presque absolu sur le pays mais il ignorait à quel point les Valaisans avaient la dent dure. Malgré les années écoulées, ils n’avaient pas oublié sa trahison. La vengeance étant un plat qui se mange froid, les paysans de Conches profitèrent du passage du prélat dans leur région pour l’attaquer en pleine nuit. Des soldats épiscopaux furent blessés, même tués et l’évêque fut kidnappé puis jeté en prison. Durant pas moins de onze semaines, Guichard demeura emprisonné à Conches, malgré l’excommunication qui frappa ses ravisseurs, lesquels n’en n’avait cure et continuaient à se rendre à la messe. Tavelli dut accepter de faire certaines concessions pour que les rebelles le libèrent.
En plus de s’être attiré les foudres du peuple, Guichard entretenait une longue querelle avec la puissante famille de la Tour au sujet de l’étendue de son pouvoir. Pour ne rien arranger, le prélat utilisa le prétexte de la légende de la donation de Charlemagne à Saint-Théodule (premier évêque du Valais à la fin du IVème siècle) pour prendre le titre de « Comte et Préfet du Valais. Cette donation légendaire, se nommant la Caroline, accordait, selon le mythe, le pouvoir total sur le Valais à l’évêque. Antoine de la Tour, seigneur de Châtillon, était le principal de la Tour impliqué dans la querelle. Il en vint même à demander au Comte de Savoie d’arbitrer le conflit mais cela ne suffit pas à contenter les deux camps. Guichard poussa la provocation plus loin en mettant la main sur la charge de major (le major faisait partie de l’appareil judiciaire valaisan et avait l’honneur de porter l’étendard de l’évêque quand il partait en campagne) ainsi que sur le château de la Majorie en 1373. Antoine de la Tour piqua la mouche et ne tarda pas à mettre sur pied un complot contre le prélat. C’est ainsi que le 8 août 1375, des meurtriers, saviésans selon la légende, pénétrèrent dans le château de la Soie (à Savièse) et jetèrent Guichard Tavelli dans le précipice de la Morge.
Château de la Majorie
Guichard fut donc, par son règne terrible, un prélat particulier. Cependant, les nombreux malheurs qui frappèrent Sion durant ces longues années sous la coupe de Tavelli permirent aux valaisans de s’unir de plus belle. Pour citer Maurice Zermatten :
« Une fin si lamentable fit oublier quelque peu les erreurs de Guichard. Tant de ruines accumulés en partie par sa faute se payaient de son existence. D’ailleurs, les défaites des communes n’allaient pas sans bénéfice. L’amour du pays et de l’indépendance se fortifie dans l’épreuve du sang. De s’être battus contre l’étranger, les patriotes ont acquis le sens de la solidarité. Des liens les unissent maintenant devant la vie et devant la mort. Leur force ainsi est plus réelle. Ils le savent. Sion, la première, en profitera pour acquérir de nouveaux privilèges. «
A suivre…
[…] tentant de mettre la main sur le canton depuis des siècles (on en parlait ici, là et encore là) choisit le camp de Charles le Téméraire. Une fois encore, Savoyards et Valaisans […]
[…] ce roman vous plaira certainement. Liens vers les articles : Première partie Deuxième partie Troisième partie Bataille de la Planta 1 Bataille de la Planta […]